Vie Expat

Être expat en temps de Covid

Rester ou rentrer ? Telle est la question.

Ces deux dernières années ont amené pour tous leur lot de challenges, de yoyo émotionnel et de remises en question. La vie n’est plus la même quoi qu’on en dise.

Mais quand est-il de l’expat, déjà isolé de ses proches de par la distance ?

Une expatriation en demi-teinte

Il faut savoir que de manière générale, le tiers des expats français envisagent de se réinstaller dans leur patrie à long terme, selon l’Observatoire de l’Expatriation. Une consultation menée par la Banque Transatlantique auprès de 8 000 français vivant à l’étranger.

Mais depuis l’arrivée de ce virus, le choix de rentrer est justifié pour beaucoup par la perte d’un emploi et de revenus à cause de cette pandémie. Ou par ceux qui arrivent en fin de visa et ne prolongent pas finalement. Ayant du mal à se projeter dans un avenir incertain, les cartes ayant été remises en jeu.

Vivre avec ce Covid a pu servir de révélateur et entrainer des sentiments partagés sur son expérience. La saveur de l’expatriation n’a plus alors le même goût.

Ne pouvoir voir ses amis et sa famille pendant plus de 2 ans avec toutes ces mesures, a été très dur à supporter pour la majorité d’entre nous.

Les allers-retours en France adoucissaient l’éloignement jusqu’à présent, permettaient d’aller se ressourcer et de retrouver sa culture.

Une réflexion sur son statut a fini par s’imposer à plusieurs d’entre nous qu’on le veuille ou non.

Se sentir prisonnier de son propre pays

Cette pandémie amène donc à reconsidérer son projet d’expat.

A se poser les bonnes questions : où on se voit évoluer ? Est-ce que l’on se sent d’être loin de sa famille et ses amis non pas par choix mais par obligation sur du très long terme ?

Car c’est une chose de savoir que l’on ne rentre en moyenne qu’une fois par an ou tous les deux ans car on ne peut se permettre plus. Mais lorsque l’on sait que l’on n’a même plus cette option, lorsque les frontières ont fermé, le sentiment d’être prisonnier de son pays d’accueil a soudainement fait peur.

D’autant plus quand on est globe-trotter, habitué à voyager. Être privé et bloqué au pays est dur à supporter quand vous n’avez même plus beaucoup d’activités pour vous changer les idées à côté (et encore moins en plein hiver par -30 dehors !)

Expats installés VS nouveaux arrivants

Que vous veniez vous installer en temps de pandémie c’est une chose. Vous venez en connaissance de cause. Ne connaissant pas la vie d’avant dans votre pays d’accueil

Tout est nouveauté malgré les restrictions, et vous avez l’impression d’échapper d’une certaine manière au quotidien morose de votre pays pour un temps.

Mais quand vous êtes installés depuis quelques années, les conséquences ne sont pas les mêmes. Comme pour ceux restés vivre dans leur pays d’origine d’ailleurs. Vous vous êtes créés une vie, un quotidien autour de votre expatriation avec le temps (travail, appart, amis, activités). Connu une ville très animée et vivante, qui en faisait toute sa renommée.

Donc le choc est rude face à la ville morte et sans âme qu’elle est devenue.

Attention je ne minimise aucunement le sentiment de solitude que cela a pu et peut toujours être pour les nouveaux arrivés également. Mais avoir vu un avant/après Covid fait un choc, surtout ici, où les mesures ont été drastiques pendant un certain temps…

D’autant plus lorsque l’on sait qu’en France, les règles étaient assouplies et que les gens pouvaient se voir. Deux poids, deux mesures, d’autant plus difficile à supporter.

Toute notre vie entière est à repenser, et c’est là où nous prenons véritablement conscience de l’importance de la vie sociale dans son quotidien.

Heureusement, le fait d’être installés depuis quelques années nous a permis de nous créer un cercle social, expat aussi essentiellement, avec lesquelles on s’entraide, on partage nos craintes, nos petits bonheurs, nos galères.

Nos seuls liens sociaux dans un quotidien de télé travail, où le virtuel remplace le contact humain

Cette norme du télétravail depuis près de 2 ans n’a pas aidé. Une lassitude, une solitude forcée.

Les journées qui passent et se ressemblent. Encore pire que la rengaine métro, boulot, dodo. Car on ne peut même plus compter le trajet en transports qui marquait au moins une coupure dans sa journée.

Pour moi, je le ressens par moments un peu comme se retrouver assigné à résidence tel un prisonnier privé de sa liberté.

Vive le quotidien en télétravail 😉

Privés de ses liens sociaux

Être coupé de son cocon en France est une chose. Mais ne même pas pouvoir s’appuyer sur ses amis, qui sont notre 2e famille ici, notre famille de cœur, de par ces restrictions, c’est trop à encaisser. Même si cette pandémie a permis aussi, paradoxalement, de resserrer les liens, s’écrire ou s’appeler plus souvent pour prendre des nouvelles, à défaut de pouvoir se voir. Mais cela ne suffit pas.

Puis cette peur de ne pas pouvoir rentrer au pays en cas d’urgence est palpable.

Que se passerait-il si un membre de ma famille tombait malade ? Pourrais-je rentrer les voir et revenir sans soucis au Canada ?

Incertitude sur l’avenir

Sans compter les conditions d’une migration au Québec. Ultra longues, chères et pas évidentes, qui font reconsidérer ses choix initiaux de venir tenter l’expérience. Ou d’y rester face à cet avenir incertain. Ces difficultés supplémentaires peuvent venir assombrir un peu plus le tableau.

Notre statut d’immigré nous revient sans cesse en pleine face. On prend conscience de notre statut. Toujours situé entre deux tant que nous ne devenons pas citoyen, nous ne sommes personne.

On a juste le droit de payer nos impôts et de se taire.

Retour tant attendu en France

Ayé ! 2 ans après, on peut enfin rentrer en France.

Me concernant, malgré la hâte et l’excitation, une petite appréhension de retrouver le sol français que j’ai connu pré-pandémie s’empare de moi.

Peur que mon pays ait changé. De ne plus le reconnaitre après toute cette crise loin d’être encore derrière nous, que le décalage soit encore plus immense avec mon entourage.

Et pourtant, mis à part, quelques changements d’enseignes, réfection de gares etc., tout est intact. Je retrouve tout de suite mes repères, ma culture. Je me sens bien, la spontanéité dans les interactions avec mes compatriotes me réconforte. Alors revoir la famille et les amis, n’en parlons pas.

(J’en parle plus en détail dans mon article sur Vie d’expat : les vacances en France )

Autant avant, à chaque retour de France, je me disais rentrer à la maison à Montréal. Or depuis cette pandémie, je n’ai plus cette même réflexion lorsque je reviens. Partagée entre ces deux mondes, ces deux cultures.

J’aurais besoin d’un mix des deux pour vivre dans le pays rêvé, dans un monde utopiste bien évidemment. Il y aura toujours des choses qui nous conviennent et d’autres moins partout où nous irons. Tout n’est jamais ou tout blanc ou tout noir.

Le cul entre 2 chaises

Dur dur de savoir où l’on se voit, ce que l’on souhaite au fond.

C’est une chose de revenir en France en vacances, en touriste, que de s’y réinstaller.

Avec toujours cette crainte de se prendre le quotidien en pleine gueule, dès que la phase d’exaltation du retour, de lune de miel sera passée. Au même titre, que lorsqu’on a plus cet attrait de la nouveauté incessante une fois pleinement installé dans son pays d’expatriation.

Et de se prendre de plein fouet la distance instaurée entre nous et ceux qui sont restés. Car ce décalage on le retrouve et c’est bien normal après tout. Mais j’imagine ô combien c’est difficile à gérer en plus de toutes les sphères de sa vie à recréer de A à Z.

Ici tout est à faire, et en France tout est à consolider

Je me retrouve personnellement aussi à de plus en plus culpabiliser de manquer de nombreux évènements importants. En l’occurrence le mariage de deux des personnes les plus importantes de ma vie cette année, qui font partie de ma vie depuis plus de 20 ans.

Mais c’est le jeu ma pauvre Lucette. On sait qu’en partant en expat, on va manquer des choses c’est certain. Peut-être que cette pandémie nous presse à vouloir profiter et passer le maximum de temps avec ceux auxquels on tient, à rattraper ces deux ans de privation, de manques, de fous rires, de danser jusqu’au petit matin, de boire jusqu’à plus soif, de sorties entre copines et j’en passe …

J’avoue me sentir seule et loin depuis cette pandémie

Je ne me posais pas beaucoup ces questions de la distance auparavant

On finit par se poser les vraies questions que nous occultions lors de la première phase insouciante des débuts de l’expatriation, en pleine lune de miel.

Même si ce genre d’expérience est à vivre dans l’instant sans se prendre la tête, idéalement, la réalité finit par s’imposer à nous à un moment donné.

Et les questions continuent à affluer : Est-ce que je me vois vieillir ici ? Réussir enfin à y faire carrière comme je le souhaiterais ? Est-ce que je suis encore en accord avec ce que cette ville a à m’offrir?

Peut-être que la réouverture progressive des cinémas, bars, salles de spectacles etc va apaiser un peu cet état d’esprit partagé. Wait and see …

En attendant si vous voulez vous faire un avis , avoir des conseils, des témoignages sur votre réflexion de retour en France, un groupe Facebook existe :

Retour en France après une expatriation – Groupe d’entraide

Et vous, ou vous situez vous aujourd’hui face à votre expatriation ?

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